Né à Cordoue en 1126, mort à Marrakech en 1198, médecin, cadi, juriste, philosophe et commentateur, Averroès (Ibn Rushd) a laissé une œuvre capitale dans tous les domaines du savoir. Celui que l’on considère comme le plus grand philosophe aristotélicien du XIIe siècle est aussi le témoin d’une époque, celle de l’«Age d’or» de l’Occident musulman.
Le Discours décisif est sans nul doute le plus représentatif de l’homme, de l’époque et de l’œuvre. Son sujet : la connexion existant entre la Révélation et la philosophie. Pour autant, le Discours décisif n’est ni un livre de philosophie ni un livre de théologie. Il s’agit d’une fatwâ, c’est-à-dire d’un avis légal qui répond à une question formulée dans les termes et le registre de la juridiction religieuse. Son propos n’est pas de réconcilier la foi et la raison, mais de justifier l’interprétation philosophique du Coran et de montrer que l’activité philosophique est légalement obligatoire pour ceux qui sont aptes à s’y adonner. Il est aussi de revendiquer un statut social pour la philosophie, garanti par le pouvoir politique, et de plaider en même temps pour une séparation radicale entre philosophie et société.
On aura compris que le Discours décisif reste d’actualité. «Le monde moderne a besoin du Discours décisif non pas seulement pour affirmer abstraitement le droit à philosopher, mais pour argumenter juridiquement une idée toute différente : l’exercice de la raison est une obligation que la Loi révélée fait aux gens de raison ; nul ne saurait interdire l’un sans enfreindre l’autre»